Le décret n° 2016-630 du 19 mai 2016 : une simplification des rubriques de la nomenclature ICPE et un soutien à la transition vers une économie circulaire

a. L’intégration des combustibles solides de récupération dans la nomenclature des ICPE, une action concrète en faveur de l’économie circulaire

L’article 70 de la loi n° 2015-922 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte dispose que la politique nationale de prévention et de gestion des déchets constitue « un levier essentiel de la transition vers une économie circulaire » et a fait de la valorisation énergétique des déchets qui ne peuvent être recyclés en l’état des connaissances scientifiques actuelles – catégorie à laquelle appartient les combustibles solides de récupération – un objectif de la politique nationale de prévention et de gestion des déchets.

De plus, l’article 70 prévoit que la préparation et la valorisation des combustibles solides de récupération devront faire l’objet d’un cadre réglementaire adapté.

C’est précisément l’objet des dispositions du décret faisant l’objet du commentaire ci-après.

– La consécration juridique de la notion de « combustible solide de récupération »

L’innovation principale de ce texte – et très attendue des parties prenantes – réside dans la consécration juridique de la notion quelque peu obscure jusqu’alors de « combustible solide de récupération » qui ne disposait d’aucune définition juridique.

Ainsi, l’article R. 541-8-1 du code de l’environnement précise-il qu’« Un combustible solide de récupération est un déchet non dangereux solide, composé de déchets qui ont été triés de manière à en extraire la fraction valorisable sous forme de matière dans les conditions technico-économiques du moment, préparé pour être utilisé comme combustible dans une installation relevant de la rubrique 2971 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement. Reste un combustible solide de récupération, celui auquel sont associés des combustibles autorisés au B de la rubrique 2910 ».

Il est important de noter que pour pouvoir être considéré comme « combustible solide de récupération », le déchet devra avoir été préparé dans le but spécifique d’être utilisé dans une installation relevant de la rubrique 2971 créée à cet effet.

Le même article précise qu’un arrêté ministériel interviendra prochainement afin de fixer les caractéristiques de ces combustibles, la liste des installations où ils peuvent être préparés ainsi que les obligations auxquelles les exploitants de ces dernières installations sont soumis en vue de garantir la conformité des combustibles préparés à ces caractéristiques.

– La création de la rubrique 2971

Le décret crée donc la rubrique 2971 intitulée « Installation de production de chaleur ou d’électricité à partir de déchets non dangereux préparés sous forme de combustibles solides de récupération dans une installation prévue à cet effet, associés ou non à un autre combustible ». Toutes les installations soumises à cette rubrique relèvent du régime de l’autorisation, qu’elles soient ou non intégrées dans un processus industriel de fabrication. Seules des installations ICPE pourront donc préparer ces combustibles solides de récupération.

Cette création répond clairement à l’objectif de faciliter la transition vers une économie circulaire, le rapporteur du texte devant le CSPRT indiquant d’ailleurs qu’il ne s’agit pas d’installations d’élimination mais d’installations ayant vocation à fonctionner uniquement pour valoriser le combustible solide de récupération (cf. compte-rendu de la séance du CSPRT du 15 décembre 2015).

La notice du décret précise que ces installations devront répondre à une demande locale pour justifier de la capacité de l’installation. Cette notion de besoin local, qui devra être prise en compte par le préfet pour apprécier la proposition du pétitionnaire sur la capacité de l’installation, n’apparait plus dans le corps du décret mais peut être retrouvée dans l’article 70 de la loi sur la transition énergétique susvisé.

Riche en contenu, la notice du décret énonce également que l’objectif principal de cette mesure « est de produire de la chaleur avec ou sans cogénération », sans que cette précision ne soit reprise dans le corps du décret ou apparaisse dans l’article 70 de la loi. Alors que la disposition législative fait référence aux installations de production de chaleur ou d’électricité, force est de constater que la notice du décret du 19 mai 2016 va plus loin, en ne faisant référence qu’à la production de chaleur.

b. La suppression du régime de l’autorisation pour les stations-services (rubrique 1435) et extension du régime de l’enregistrement

Le décret supprime le régime de l’autorisation pour les stations-services et étend le régime de l’enregistrement en déplafonnant son champ d’application. Cette mesure s’inscrit dans le cadre de la démarche de simplification liée aux actions de modernisation de l’action publique.

Pour mémoire, les stations-service sont classées dans la nomenclature des ICPE en fonction du débit annuel de carburant qu’elles distribuent.

Le régime de l’autorisation, qui visait auparavant les stations-service dont le débit annuel de carburant était supérieur à 40 000 m³, a été supprimé. Le régime de l’enregistrement a été étendu et concerne dorénavant toutes les stations-services dont le volume annuel de carburant liquide distribué est supérieur à 20 000 m³.

Le régime de la déclaration n’a quant à lui pas fait l’objet de modification et est applicable aux installations dont le volume annuel distribué est supérieur à 100 m³ d’essence ou 500 m³de carburant liquide au total, mais inférieur ou égal à 20 000 m³.

On notera que, dans un souci de cohérence, un arrêté ministériel du même jour modifie l’arrêté de prescriptions générales du 15 avril 2010 de la rubrique 1435 pour le régime de l’enregistrement et abroge un autre arrêté du 15 avril 2010 qui fixait les règles générales et prescriptions techniques applicables aux stations-service soumises à autorisation sous la rubrique n° 1435.

Les exploitants d’installations anciennement autorisées ont le choix soit de conserver leur arrêté d’autorisation soit d’appliquer l’arrêté d’enregistrement.

Si la suppression de la rubrique de l’autorisation, conséquence du « choc de simplification » est la bienvenue, en pratique, cette mesure ne va concerner qu’un nombre réduit d’installations.

En effet, d’après certains membres du CSPRT, qui a rendu le 30 juin 2015 un avis favorable sur le décret et l’arrêté modificatif, sur les 12 000 stations-service en activité, près de la moitié sont classées ICPE. Au sein des stations-service ICPE, seules 65 étaient soumises au régime de l’autorisation et 600 au régime de l’enregistrement.

c. La mise en cohérence des rubriques de la nomenclature ICPE relatives aux installations de déchets
Enfin, le décret du 19 mai 2016 fait souffler un vent de cohérence dans les rubriques de la nomenclature ICPE relatives aux installations de déchets.

– La mise en cohérence des rubriques 2771, 2791 et 2910 avec la création de la nouvelle rubrique 2971

Les rubriques 2771, 2791 et 2910 ont été modifiées afin que leur champ d’application concorde avec celui de la rubrique 2971.

– La mise à jour de la rubrique 3540 relative aux installations de stockage autre que celles accueillant des déchets issus de l’extraction de matériaux et celles accueillant des déchets inertes

Le décret modifie le libellé de la rubrique 3540 afin de prendre en compte les modifications du cadre juridique applicable aux installations de stockage de déchets inertes apportées dans les dix-huit derniers mois.

Pour rappel, le décret n° 2014-1501 du 12 décembre 2014 modifiant la nomenclature des ICPE avait, entre autres modifications, soumis les installations de stockage de déchets inertes à la législation des ICPE, en adoptant le régime de l’enregistrement, en lieu et place du régime d’autorisation ad hoc qui était auparavant le leur.

Ainsi, depuis le 15 décembre 2014, les installations de stockage de déchets inertes sont visées à la rubrique 2760-3.

Le décret ici commenté met donc en cohérence le libellé de la rubrique 3540 avec cet ajout dans la nomenclature, en prévoyant que la rubrique 3540 ne concerne pas les installations de stockage de déchets inertes relevant de la rubrique 2760-3.

Dans le même sens, le décret supprime la référence à l’article L. 541-30-1 du code de l’environnement, lequel, jusqu’à la loi de transition énergétique du 17 août 2015 précitée, avait pour objet l’autorisation administrative ad hoc d’une installation de stockage de déchets inertes.